62% des offres d’emploi accessibles sur le site de la Ville de Lorient sont illégales

Étude réalisée par les occupants du Grand Théâtre de Lorient expulsé avec le concours du comité CGT des travailleurs privés d’emploi et précaires de Lorient !

Les offres d’emploi disponibles sur le site de la mairie sont illégales à 62%

Après avoir entendu de nombreuses fois de la bouche du maire de Lorient qu’il y a avait plein d’offres non pourvues, c’est-à-dire que plein d’employeurs avaient du mal à recruter, nous avons voulu creuser le sujet, et nous avons tout simplement consulté le site de la mairie pour savoir ce qu’il contenait.

Un contexte politique et social calamiteux pour les travailleurs et travailleuses

Le chômage de masse, à Lorient comme ailleurs, s’est installé au milieu des années 80. Au chômage de masse s’est joint la précarité de masse. 20% des contrats dans les fonctions publiques sont en attente de titularisation. Et, dans le privé, le nombre de CDD, de contrats de travail temporaire (intérim) et de temps partiel a explosé.

Sur le bassin de Lorient, 22% de la population active est inscrite au Pôle emploi.

26% des salariés sont sous contrat précaire.

Le turn-over est de 100% en moyenne (84.000 contrats signés par an pour 84.000 salariés).

94% des contrats proposés sont précaires.

Dans ce contexte d’hyper précarisation des emplois, parler « d’offres non pourvues » est déjà un scandale.

Les salariés occupent déjà des emplois précaires et sous-qualifiés en attendant de trouver un emploi stable, et décent : la moitié des inscrits au Pôle emploi occupent un poste précaire.

Pour les plus de 50 ans, le nombre d’inscrits de longue durée au Pôle emploi a été multiplié par deux en 10 ans.

La Bretagne a le record national en termes d’accident du travail, maladies professionnelles et bas salaires.

Les patrons précarisent, les salariés occupent les rares emplois précaires sous-qualifiés qu’ils trouvent, mais ça ne suffit pas.

Il faudrait encore les humilier en osant dire « les patrons ne trouvent pas preneur ».

Ce ne sont pas les offres qui ne sont pas pourvues, mais les salaires de misère et les mauvaises conditions de travail.

Les patrons qui pleurent parce que soit disant ils ne trouvent personne à embaucher (agro-alimentaire, bâtiment, hôtellerie-bar-restauration, aide à la personne…) sont ceux qui proposent les salaires les plus faibles, les conditions de travail les plus pénibles ou les plus dégradées, et qui souvent imposent des heures sup’ non payées, ou alors au noir (hôtellerie-bar-restauration).

La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences s’organise par filière, entre autres en augmentant les salaires, en diminuant la pénibilité et en respectant le code du travail.

Étudier les offres d’emploi pour rétablir la vérité

Dans ce contexte, nous avons étudié 1081 offres d’emploi disponibles le 28 mai 2021 en première page du site lorient.bzh.

Ce site est le site officiel de la mairie de Lorient.

Nos critères étaient : toutes les offres disponibles ce jour-là sur la commune de Lorient.

Le résultat est calamiteux : 62,7% des offres d’emploi diffusées sont illégales.

Qu’est-ce qu’une offre d’emploi illégale ?

Lorsque vous achetez une voiture sur un site commercial, et que le vendeur vous indique « Clio de 100.000 km », et qu’en fait la voiture indique 200.000 km au compteur, il y a tromperie. L’article L121-2 du code de la consommation précise : Interdiction d’indiquer des « mentions fausses ou susceptibles d’induire en erreur ».

En droit du travail c’est pareil. L’article L 5331-3 interdit d’écrire de fausses allégations dans une offre d’emploi. Il faut que le contenu de l’offre corresponde au contrat de travail proposé.

Pôle emploi se moque des chômeurs.

Le site lorient.bzh utilise un algorithme (logiciel) qui renvoie vers le site pole-emploi.fr. Déjà épinglé à 10 reprises par la CGT pour diffuser des offres d’emploi illégales, manifestement cet organisme continue de se moquer ouvertement des candidats.

Le mensonge et le mépris sont devenus la norme

Le mensonge

Le mensonge car, quand on contacte les entreprises de travail temporaire pour un emploi dans le bâtiment indiqué « contrat d’1 mois » voire « contrat de 6 mois », toutes nous disent qu’en fait il s’agit d’un contrat d’une semaine. Une offre d’aide-soignant de 28 heures cache en fait 15 contrats par mois, un pour chaque remplacement…

Chez O2 on vous propose des CDI de 24 heures par semaine, voire à temps plein. Sauf que quand on les contacte, il s’agit en fait de quelques heures par semaine. Et, plus tard, peut-être, de nouveaux contrats. Sauf que l’espoir ne remplit pas le frigo.

Pour « faire passer la pilule » de la précarité, les requins n’hésitent pas à écrire de gros bobards pour faire venir à eux les candidats. Peu importe si c’est illégal…

De belles promesses, mais illégales

indiquer sur une offre « emploi en intérim pour commencer qui se transformera en CDI » est mensonger donc illégal, car l’entreprise utilisatrice fera bien ce qu’elle voudra. Seul le premier contrat signé fait foi.

De plus, un contrat de travail temporaire ne peut avoir pour effet de « pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice » (article L 1251-5 du code du travail).

Pareil pour les CDD (voir article L 1242-1).

Ceux qui vous parlent de « CDD ou intérim période d’essai » vous abusent, car dans un CDI, il y a une période au début (la réelle période d’essai) qui permet d’évaluer les ouvrier ou employés (1 mois éventuellement renouvelable), les techniciens (2 mois éventuellement renouvelables), ou les cadres et ingénieurs (3 mois éventuellement renouvelables).

Le mépris

Le mépris car quand on se rend compte que de nombreuses offres ne sont tout simplement pas relues, il s’agit bien d’un manque de respect massif.

Nous avons découvert des offres d’emploi sur Lorient à pourvoir au Canada, à Nantes ou en Normandie.

Nous constatons de nombreuses incohérences sur l’expérience requise (indiqué « 3 ans » à un endroit, puis « 1 à 7 ans » à un autre endroit) dans le corps d’une même annonce.

Nous avons aussi trouvé des incohérences métier : les deux offres disponibles dans le domaine professionnel artistique sont en fait un poste de Manager en restauration rapide ou un autre dans l’agro-alimentaire.

Des offres en tant que charpentier industriel dans la navale sont classées dans le bâtiment.

Nous avons aussi trouvé une offre de « vente en alimentation »… chez Darty !

Doublons : certaines offres sont copiées/collées de nombreuses fois. Nous avons trouvé une offre, la même, 9 fois !

Commerces à vendre

Nous recensons également aussi beaucoup d’offres de franchises. Il faut sortir 15, 20, ou 25.000 euros pour investir dans la franchise. Ces offres n’ont rien à faire sur le site de Pôle Emploi, car ce ne sont pas des offres d’emploi.

Publicité à tous les étages

Beaucoup d’offres sont en fait de simples publicités pour les recruteurs, entreprises de travail temporaires, ou cabinets de recrutement.

Sans contrôle de la part de Pôle Emploi, on les laisse diffuser n’importe quoi.

Certaines offres ne sont même pas lisibles (caractères parasites, copiés/collés erratiques…)

En outre, les mentions « CDD, CDI et interim » ne peuvent pas figurer dans une même annonce car elles sont susceptibles d’induire en erreur, donc illégales.

Le problème des offres à temps partiel sans emploi du temps

Quand une personne répond à une offre à temps partiel, elle a absolument besoin de connaître l’emploi du temps associé.

En effet, elle peut avoir déjà un emploi à temps partiel qu’elle souhaite compléter. Ou des contraintes personnelles.

Même si l’emploi du temps peut être amené à changer (l’employeur doit toutefois respecter un délai de prévenance de 15 jours), il est important de savoir sur quels horaires on s’engage au départ.

C’est déjà assez de devoir subir le temps partiel sous-respecté (postes de travail qualifiés soit-disant non qualifiés) et sous-payé. On a quand même le droit de connaître l’emploi du temps avant de postuler !

Monsieur le Maire, Monsieur le Directeur Général de Pôle emploi, Monsieur le Directeur de la Direction du Travail, Monsieur le sous-Préfet, il faut maintenant agir.

Les salariés précaires du bassin de Lorient ont droit à un minimum de respect.

Pôle emploi, dont la toute première mission est de diffuser des offres d’emploi légales, doit mettre fin à ses pratiques de « laisser faire » des plateforme de diffusion d’offres d’emploi, et doit reprendre le contrôle de la diffusion des offres. Au lieu d’embaucher des contrôleurs des chômeurs, il faut embaucher des contrôleurs des offres d’emploi pour qu’elles soient tout simplement conformes aux contrats proposés par les employeurs. C’est une obligation légale !

Les discours stigmatisant les chômeurs doivent cesser. Chacun doit prendre ses responsabilités. Dans un bassin sinistré, où seule la population des plus de 60 ans a des perspectives de croissance démographique, il est temps de lutter contre la précarité au lieu de lutter contre les précaires, en leur imposant toujours plus de flicage, toujours moins de contrats pérennes et toujours moins de salaire et d’allocations.

La perle :

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serveur de secours pour les offres étudiées

Source : https://gtlo.fr/62-des-offres-demploi-accessibles-sur-le-site-de-la-ville-de-lorient-sont-illegales/