Depuis Novembre 2019, le tableau de bord numérique ou journal de la recherche d’emploi est expérimenté dans toutes les agences Pôle-Emploi des régions Bourgogne-Franche-Comté et Centre-Val-de-Loire. Ces deux régions n’ont pas été choisies au hasard : à prédominances rurales, de nombreux travailleurs privés d’emploi ne peuvent se rendre aussi facilement à leur agence que ceux qui habitent en zone urbaine ou péri-urbaine.
Au lieu de développer des agences de proximité avec des accueils physiques et d’élargir l’aide à la mobilité à l’ensemble des inscrits à Pôle-Emploi, le gouvernement a préféré recourir au tout-internet.
« Accompagnement numérique » ou contrôle social ?
Jean Bassères a affirmé que le journal de bord ne serait « pas un élément de contrôle ». « Si on le réussit, vous aurez une qualité de dialogue entre un conseiller Pôle emploi et les demandeurs d’emploi en face de lui qui sera largement améliorée ». Nous avons évidemment du mal à le croire… Il faut dire que les chiffres ne lui donnent pas raison : les radiations ont augmenté de 6% en 2019 !
Lors des Comités de Liaison Départementaux, nous avons interrogé les directions départementales sur la possibilité que le tableau de bord serve à renforcer la politique répressive de Pôle-Emploi depuis que les effectifs chargés du contrôle de la recherche d’emploi ont été multipliés par trois ! Et la nouvelle mouture de l’actualisation n’aide pas à calmer nos inquiétudes :
Lors de leur actualisation les travailleurs privés d’emploi se voient contraints de remplir un questionnaire leur demandant s’ils peuvent justifier de candidatures, d’entretiens d’embauches, des demandes de formation ou si ils ont travaillé sur un projet de reconversion professionnelle… autant de démarches que l’on pourrait qualifier d’actes positifs et répétés en vue de rechercher un emploi. Avant de valider l’actualisation, une fenêtre rappelle même que pour rester inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi il faut « accomplir et pouvoir justifier des démarches en vue de retrouver un emploi » :
Pour le Comité National CGT des travailleurs Privés d’Emploi et Précaires (CNTPEP-CGT), le journal de la recherche d’emploi illustre parfaitement le changement de logique qui s’opère au sein du service public : de la logique d’un accompagnement physique en agence on passe à une logique du tout contrôle numérique à distance ! Pourtant, c’est bien le code du travail qui donne pour mission à Pôle-Emploi d’accompagner les travailleurs privés d’emploi au retour à l’emploi. Jean Bassères semble l’avoir oublié et ne se gêne pas de dire publiquement que « Pôle-Emploi n’est pas là pour retrouver du travail aux chômeurs » !
La direction générale de Pôle-Emploi doit respecter ses missions de service public !
Dans son rapport annuel, la cour des comptes fustige la politique du tout-numérique à Pôle-Emploi en affirmant que « l’approche que développe aujourd’hui l’opérateur comporte le risque de confondre autonomie dans l’usage du numérique et autonomie dans la recherche d’emploi ». Alors que la Direction Générale de Pôle-Emploi estime que ces propos sont inexacts : la preuve en est avec l’expérimentation du tableau de bord.
Au-delà du tableau de bord, au fil des ans, Pôle-Emploi se défausse de plusieurs de ses missions de service public comme celle du contrôle des offres sur son site internet. D’après nos études : plus de 50% des offres disponibles sur le site sont illégales, mensongères ou bidons !
Nous exigeons donc que cette politique du tout-internet au service exclusif du flicage des travailleurs privés d’emploi cesse et que l’accompagnement physique de qualité soit rendu possible sur tout le territoire ! Atteindre un niveau d’accompagnement capable de combattre le sentiment d’abandon vécu par de nombreux travailleurs privés d’emploi passera par une embauche massive de conseillers formés et des politiques publiques résolument orientés vers l’emploi. (voir également notre tract « Des deux côtés du guichet, nous avons des intérêts partagés ! »)